L’article L.123-1-9 du Code de l’urbanisme1 pose le principe selon lequel « les règles et servitudes définies par un plan local d’urbanisme ne peuvent faire l’objet d’aucune dérogation, à l’exception des adaptations mineures […] ».
L’adaptation mineure constitue donc un assouplissement au principe énoncé par le code de l’urbanisme. Un assouplissement très encadré mais laissant une large marge d’appréciation au service instructeur.
Les motifs pour obtenir le bénéfice d’adaptations mineures
C’est l’article L. 123-1-9 du code de l’urbanisme qui indique que les adaptations mineures doivent être rendues nécessaires par :
- la nature du sol,
- la configuration des parcelles
- ou le caractère des constructions avoisinantes
Précisons que ces motifs ne sont pas cumulatifs.
Tout autre motif, comme par exemple l’intérêt économique du projet, est systématiquement rejeté. Les juges considèrent en effet que les adaptations aux règles prescrites par le document d’urbanisme « ne peuvent être légalement décidées que pour autant qu’elles sont rendues nécessaires par l’une des causes limitativement énumérées par la loi et qu’en outre, elles n’aménagent que de manière limitée les règles normalement applicables ».2
L’adaptation doit être mineure
L’adaptation mineure ne peut porter atteinte à la règle concernée que de manière très limitée. On parle de manière générale d’une tolérance de 10% par rapport à la règle en vigueur.
Dans un arrêt rendu le 30 juillet 1997 par le Conseil d’Etat3, il a été considéré comme « mineure », l’adaptation qui consistait à autoriser un coefficient d’emprise au sol de 52,8%, excédant le coefficient de 50% fixé par le règlement pour « tenir compte de l’existence d’irrégularités de périmètre dans cette partie du terrain et de la nécessité de préserver le caractère « en bande » des constructions de ce secteur ; qu’elle était ainsi, au sens des dispositions précitées, rendue nécessaire par le caractère des constructions avoisinantes ; ».
Tout comme « le décalage de 20cm entre une limite de propriété et la limite de construction autorisée » a été considéré comme « une adaptation mineure justifiée par la configuration des parcelles en cause. »4
Ou encore, le cas de la voie destinée à desservir un immeuble de 17 logements dont la largeur « est sur de très faibles portions inférieure de 18 cm aux 6 mètres exigés par le règlement du plan d’occupation des sols », ce rétrécissement très limité étant « rendu nécessaire par la configuration des parcelles« .5
Dans le même sens, le dépassement de 85 cm de la hauteur maximale autorisée présente, « compte tenu du fait qu’il n’existe que sur l’une des façades et alors que le reste de la construction ne dépasse pas la hauteur autorisée, le caractère d’une adaptation mineure justifiée en l’espèce par la déclivité du terrain servant d’assiette à la construction« .6
A contrario, il a été jugé « que le dépassement de 4 mètres autorisé par le permis de construire litigieux ne pouvait être regardé comme une adaptation mineure ».7
Mais on peut relever quelques rares décisions qui dérogent au principe d’aménagement limité à la règle normalement applicable comme l’arrêt du Conseil d’Etat du 30 juin 19998 dans lequel les juges ont admis le bénéfice d’une adaptation mineure s’agissant de l’implantation d’une construction à 6.20m par rapport à l’axe des voies existantes alors que la règle du POS imposait 10m de recul. L’adaptation était « motivée par le fait que l’implantation de l’extension projetée à moins de 10 m de l’axe de la servitude de passage n’est pas de nature à compromettre l’aménagement du secteur en cause et qu’elle est imposée par l’étroitesse de l’unité foncière servant d’assiette à la construction ».
Comme on peut le constater, il importe peu que la demande du pétitionnaire constitue une atteinte limitée à la règle si cette demande n’est pas assortie d’un motif autorisé par la loi.
L’adaptation doit être motivée
Le principe est posé à l’article L.424-3 du code de l’urbanisme :
Lorsque la décision rejette la demande ou s’oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée.
Il en est de même lorsqu’elle est assortie de prescriptions, oppose un sursis à statuer ou comporte une dérogation ou une adaptation mineure aux règles d’urbanisme applicables.
Ainsi qu’à l’article R.424-5 du code de l’urbanisme :
Si la décision comporte rejet de la demande, si elle est assortie de prescriptions ou s’il s’agit d’un sursis à statuer, elle doit être motivée.
Il en est de même lorsqu’une dérogation ou une adaptation mineure est accordée.
Il en résulte qu’un service instructeur peut délivrer une AOS dérogeant aux règles du document d’urbanisme en vigueur à la condition que l’adaptation mineure soit « prévue et motivée » dans la décision.9 Cette obligation de motivation interdit qu’une adaptation mineure puisse être accordée implicitement.10
L’adaptation n’a pas à être demandée par le pétitionnaire
Jusqu’à une date très récente, il était considéré que l’adaptation mineure devait être demandée par le pétitionnaire dans son dossier pour pouvoir en bénéficier.
Mais dans un arrêt de principe rendu le 11 février 201511, le Conseil d’Etat a estimé que :
3. Considérant qu’il appartient à l’autorité administrative, saisie d’une demande de permis de construire, de déterminer si le projet qui lui est soumis ne méconnaît pas les dispositions du plan local d’urbanisme applicables, y compris telles qu’elles résultent le cas échéant d’adaptations mineures lorsque la nature particulière du sol, la configuration des parcelles d’assiette du projet ou le caractère des constructions avoisinantes l’exige ; que le pétitionnaire peut, à l’appui de sa contestation, devant le juge de l’excès de pouvoir, du refus opposé à sa demande se prévaloir de la conformité de son projet aux règles d’urbanisme applicables, le cas échéant assorties d’adaptations mineures dans les conditions précisées ci-dessus, alors même qu’il n’a pas fait état, dans sa demande à l’autorité administrative, de l’exigence de telles adaptations ;
4. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme D…et M. B…soutenaient devant la cour administrative d’appel de Paris que leur projet était conforme aux règles relatives à l’implantation des constructions par rapport aux voies publiques et privées et par rapport aux limites séparatives, fixées par les articles UD 6 et UD 7 du règlement du plan local d’urbanisme, au bénéfice d’adaptations mineures de ces règles ; qu’il résulte de ce qui précède qu’en se fondant, pour écarter un tel moyen, sur le fait que Mme D… et M. B…n’avaient pas fait état, dans leur demande de permis de construire, d’adaptations mineures des règles en cause, la cour a commis une erreur de droit ;
Désormais, même lorsque le pétitionnaire ne réclame pas expressément le bénéfice d’une adaptation mineure lors du dépôt de son dossier, le service instructeur devra, de son propre chef, instruire le projet en recherchant si une adaptation permettrait de ne pas refuser la demande du pétitionnaire.
Remerciements particuliers à Jean Duverdier, qui m'a autorisé à utiliser un de ces dessins pour illustrer cet article. Retrouvez l'ensemble de son travail sur le site www.jean-duverdier.com.
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